Produire des semences en AB : enjeux et opportunités pour l'agriculture régionale

Dans un contexte d’évolution réglementaire, d’augmentation de la demande en semences certifiées, d’enjeux croissant en matière de qualité de la semence, mais également au regard des bouleversements climatiques en cours... Bio en Hauts-de-France a piloté en 2020 un état des lieux de la production de semences en région. Réalisé dans le cadre du Plan bio régional, il vise à mieux connaître la filière régionale pour sensibiliser les producteurs et les acteurs à ces opportunités de diversification et de création de valeur dans les fermes.


Semences : connaître et comprendre l'écosystème

En France, les travaux de recherche menés par des obtenteurs privés ou par des acteurs publics tels que l’INRAE permettent de créer de nouvelles variétés végétales. Des paysans-chercheurs, notamment réunis dans le réseau semences paysannes, contribuent également à redécouvrir des semences et variétés anciennes. La seconde étape est l’inscription de la variété au catalogue variétal par le Ministère de l’agriculture. Ensuite, des producteurs-multiplicateurs développent la production de semences via des contrats avec les semenciers.

La production de semences bio en Hauts-de-France : état des lieux

En France, on observe une augmentation de +22% des surfaces dédiées à la multiplication entre 2018 et 2019, soit près de 14 000ha dédiés. La région Hauts-de-France est un bassin historique en multiplication de semences grâce à son climat adapté et des acteurs mobilisés. En 2020, 3,7 % des agriculteurs multiplicateurs de semences en région sont en bio ce qui représente 2,8% des surfaces destinées à la multiplication de semences. Le développement exponentiel des surfaces converties à l’agriculture biologique en région ces 5 dernières années sont autant de surfaces qui pourraient être destinées à la multiplication de semences pour l’agriculture bio. La région se distingue principalement sur la production de semences de blé et de plants de pommes de terre : 17% des plants de pomme de terre français bio sont produits en région et 10% des semences de céréales.

La réglementation bio évolue : des opportunités à saisir !

semences

Alors que l’Union Européenne a soulevé l’obligation d’utiliser des semences biologiques pour la production certifiée bio en 1991, ce n’est qu’en 2003 que ce principe est finalement adopté. L’offre n’étant pas suffisante pour répondre à la demande croissante des producteurs, des dérogations sont accordées aux agriculteurs, leur permettant d’utiliser des semences non traitées. Une fois la filière suffisamment développée, les variétés passent en « hors dérogation » car considérées comme suffisamment disponibles.

Ce système de dérogation est voué à disparaître. L’Europe s’est fixé une échéance à 2035 pour en sortir tandis que l’INAO (Institut national de l’origine et de la qualité) pense pouvoir le faire dès 2025. Pour répondre à ce besoin croissant en semences de qualité sur l’ensemble des variétés, des perspectives de développement significatif sont à saisir pour les acteurs de la filière – obtenteurs – producteurs – multiplicateurs. Cette évolution réglementaire présente des opportunités à la fois pour la diversification des fermes bio par l’implantation de nouvelles cultures à valeur ajoutée et pour impulser de nouvelles conversions. En région, en complément des essais menés par initiatives paysannes sur les semences paysannes et du travail des sélectionneurs, Bio en Hauts-de-France s’est engagée en 2021 sur deux projets : valoriser le patrimoine légumier régional en AB et relocaliser la production de semences de céréales et protéagineux. (voir encadré plus loin)

Pour aller plus loin

Découvrez notre dernière publication, réalisée dans le cadre de l’Observatoire Régional de l’AB (ORAB), disponible et téléchargeable gratuitement sur www.bio-hautsdefrance.org

  • à télécharger au format PDF ICI
  • à consulter en ligne ICI
  • exemplaires papier disponibles auprès de Pauline Rebreyend

VOTRE CONTACT :

Pauline Rebreyend : 07 87 32 85 80 / p.rebreyend@bio-hdf.fr

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Deux projets régionaux pour répondre à ces enjeux

Dans ce contexte porteur, deux projets sont actuellement développés avec nos partenaires, financés dans le cadre du Plan bio régional.

1. Valoriser et développer le patrimoine légumier régional en agriculture biologique

Ce projet est mené en partenariat avec le CRRG (Centre Régional des Ressources Génétiques), dont l’une des missions est de retrouver et sauvegarder le patrimoine légumier régional. Si la valorisation auprès des particuliers est aujourd’hui réussie, aucune filière n’existe à destination des professionnels.

Le projet, en bref :

  • Sensibiliser les maraîchers à l’utilisation de variétés anciennes régionales
  • Organiser des tours de plaine pour présenter les variétés
  • Mettre en place des micro-essais sur l’année 2021 : 5 variétés sont actuellement testées chez des maraîchers volontaires
  • Organisation de formations sur l’autoproduction de semences

Une enquête en cours de diffusion pointe que 50 % des maraîchers ont recours aux dérogations et 2/3 d’entre eux considèrent qu’il manque de choix en terme de variétés disponibles en bio et adaptées aux besoins des maraîchers.

2. Relocaliser la production de semences de céréales et protéagineux via l’investissement dans une unité dédiée dans l’Oise

En partenariat avec la FNAMS (Fédération National des Agriculteurs Multiplicateurs de Semences) et le SEMAE (inter- profession des semences et plants), nous travaillons à l’émergence d’une filière de production, triage de semences, en lien étroit avec Thomas Bourgeois, agriculteur bio dans l’Oise.

Le projet, en bref :

  • Analyser les offres / demandes actuelles en semences de céréales et oléo-protéagineux bio à travers un sondage en ligne
  • Développer l’offre de production de semences bio en région en quantité et en qualité
  • Sensibiliser et former les producteurs au métier de multiplicateur. 25 participants nous ont rejoint lors de notre tour de plaine dédié le 19 mai dernier
  • Dimensionner et développer un outil de stockage, triage sous forme de micro-filière chez Thomas Bourgeois (60)